La voix du Sahel

AFFAIRE SALIF DIALLO: IL Y A 13 ANS...

IL Y A 13 ANS...

Ah! le chiffre 13. Serait- il vraiment maléfique. On est tenté parfois de le croire. Il y a 13 ans. Le temps avait fait son oeuvre et je commençais à oublier. heureusement qu'il y a l'oublie. Mais avec cette affaire Salif Diallo, je m'en souviens comme si c'était hier. Oui, il y a très ans, un autre Diallo, venait de subir les foudres du prince et de sa cour, pour n'avoir pas su manger et se taire. Il y a 13 ans, ce Diallo là, osait dire haut et fort ce que chacun savait mais n'osait pas le clamer haut et fort. Mais que disait ce Diallo à l'époque? Exactement ce que, 13 ans, l'un des bâtisseurs du système en place étale sur la place publique: que la démocratie doit être repenser et renforcer, qu'il y avait trop de courtisans autour du chef qui ne lui disaient pas la vérité. Et ce Diallo là avait conclu: «  Face au mépris et à l'égarement, il n'y a que la rue et les armes... » Nous sommes en 1996, soit à peine 5 ans de processus démocratique. Mais déjà, ce Diallo là avait perçu les signes avant- coureurs de la patrimonialisation de l'Etat. Il avait déjà senti venir la naissance et la consolidation des clans qui prendront en otage le chef de l'Etat. Alors, il a cru bon d'en parler publiquement. Le pauvre! La sanction fut sans appel. Ce Diallo là, fut chassé malproprement de la maison du chef et jeté dans la rue. A l'époque, le Diallo qui est aujourd'hui en disgrâce était l'oeil et l'oreille du chef. On ne peut rien affirmer, mais on pourrait avancer que du fait de sa toute puissance, Salif Diallo a pu faire partie des faucons qui ont fait jeter les affaires de cet Diallo de 1996 dans la rue. Car à l'époque, l'opinion qu'exprimait cet Diallo là, était tout simplement du lèse- majesté . Mieux, Salif Diallo était à l'époque le plus proche collaborateur du chef de l'Etat, et certainement s'est senti visé. Par conséquent, il ne pouvait plus tolérer ce Diallo là dans le cercle du chef. Et à l'époque, chasser malproprement ce Diallo là était perçu comme un service rendu au chef. Mais voilà que 13 ans, jour pour jour, l'histoire donne raison à Son Excellence l'ambassadeur Ismaël Diallo puisque c'est de lui qu'il s'agit. Un petit rappel.

L'ambassadeur Ismaël A. Diallo est un fonctionnaire international. Il fut le premier Directeur du Centre d'information des Nations Unies à Ouagadougou. C'est un révolutionnaire convaincu auprès de qui les jeunes turcs de la révolution du 4 août 1983 s'abreuveront de principes révolutionnaires. En effet, malgré son statut de fonctionnaire international qui lui imposait un droit de réserve, le Directeur du CINU qu'il était ne cachait point ses accointances avec les dirigeants de la révolution burkinabè. On le disait à l'aise avec Thomas Sankara, mais admirait « le calme » de Blaise Compaoré. En vérité, et en bon diplomate, il savait faire cohabiter la chèvre et le choux, si tant qu'il su préserver une sorte de neutralité entre les deux personnages clés de la révolution. Lorsqu'arriva le 15 octobre 1987, on raconte que l'ambassadeur Diallo fut parmi les premiers appelés au secours par l'actuel chef de l'Etat. Par la suite, et pour des obligations professionnelles, l'ambassadeur Diallo quittera le Burkina pour un poste à Kigali au Rwanda endeuillé par le génocide. Mais pas pour longtemps. En effet en 1995 ( ?) Ismaël Diallo démissionne les Nations Unies pour « se mettre à la disposition de son pays ».A l'époque, beaucoup se sont posés la question sur «  cette folie subite » de M. Diallo. Car, quitté le cadre douillet de fonctionnaire international pour venir s'installer au Burkina avec femme et enfant, il fallait être fou pour avoir un tel courage. Mais M. Diallo n'en avait cure. Disons qu'il avait ses raisons. A l'époque, il avait ses entrées chez son ami et camarade Blaise Compaoré à qui il dispensait toujours quelques principes révolutionnaires, même si la révolution était enterrée par l'adoption de la loi fondamentale. A l'époque également, l'épouse de M. Diallo, Naye «  la vache préférée » en fulfuldé avait également ses entrées chez la première dame, Chantal Compaoré. Si donc le couple Diallo était dans les bonnes grâces du couple présidentiel, où est le problème. Il n' y avait pas de problème puisque M. Diallo sera bombardé du titre envié de «  Conseiller spécial du Président du Faso ». Ce fut la première fois que voyait le jour un tel poste. Avec ce pompeux titre, M. Diallo était au faîte de la gloire et de la puissance. Il pouvait voyager et participer à toute les garden partie du prince. A l'époque, on apercevait M. Diallo a Dori à bord de sa pajero, et il était une fierté pour les gens de Dori qui manquait désespérément d'oreille auprès du chef de l'Etat. Et à l'époque, M. Diallo usa de son influence pour régler pas mal de problèmes à Dori. C'est lui qui, à l'époque fit affecté un chirurgien au CHR de Dori qui n'en avait pas en l'occurrence le Dr Yago. C'est le même Diallo qui intima l'ordre à la SONABEL le fonctionnement 24/24 de l'électricité à Dori. C'est lui également...Bref, le Conseiller Spécial n 'avait pas oublié les siens.

Voilà quelqu'un dans les grâces du prince et son épouse également admirée par la première dame du pays. Voilà quelqu'un qui, au bout du fil, dès qu'il décline son identité, son vis-à- vis se met à ses ordres. Que pouvait-il vouloir que le prince lui refuse? Rien. Que pouvait-il faire qui ne puisse pas marcher? Rien.

Alors, au lieu de jouir de tous ces privilèges, au lieu de manger et se taire, le conseiller spécial de Blaise Compaoré, Ismaël A. Diallo va trouver un moyen pour s'arracher lui- même la cuillère de sa bouche. Et cela à travers une interview.



L'interview fatale

Le Journal la Voix du Sahel, comme son nom l'indique est le seul organe de presse écrite édité dans cette partie du Burkina Faso depuis 1994. En 1996, plus précisément en juin, et comme tout journal à la recherche de trains en retard, nous avons approché son Excellence l'ambassadeur Ismaël A. Diallo qui était, faut-il le rappeler le personnage en vue à l'époque dans la région du Sahel. Et à vrai dire, l'homme avait la cote – et il semble l'avoir toujours- auprès d'une certaine franche de la population. Il tenait en effet un langage qui tranchait d'avec l'hypocrisie des autres politiciens. M. Diallo avait une autre conception de la politique qui avait écho auprès des populations sans oublié sa vision du développement également. Avoir une interview de ce personnage était donc notre souhait. Contacté, son Excellence ne trouva aucun inconvénient à s'exprimer dans les colonnes de la Voix du Sahel. Rendez vous fut pris à son domicile à Dori. Pendant 04 heures d'horloge, nous échangions avec lui. A la fin de l'entretien, mon collaborateur, Touré Daouda me posa cette question: «  Vous allez vraiment publier cette interview »? «  Et pourquoi pas »? lui ai-je répondu. Et pourtant! En effet, après le traitement de l'élément, je fus pris d'une frayeur inhabituelle. C'était terrible. Terrible les propos de M. Diallo. Je mis immédiatement les éléments au frigo...pendant une semaine. Las de voir paraître son interview, M. Diallo nous interpella en ces termes: «  Si vous saviez que vous n'allez pas publier mon interview, pourquoi m'avoir fait perdre mon temps »? Je pris alors mon courage à deux mains et j'expliquai à son Excellence, les conséquences directes et les effets collatéraux que ne manquera pas de produire de tels propos dans un tel contexte. N'oubliez pas que nous venons à peine de sortir de l'Etat d'exception. «  Vous avez peur pour moi ou pour votre journal... »? Question de M. Diallo. «  Les deux Excellence, et encore plus pour vous ». «  Si c'est pour moi, aucune crainte... » a-t-il répliqué. Je tentai un compromis. Je demandai à son Excellence s'il était possible de biffer certains passages de l'interview? «  Aucunement » avait- il rétorqué. Advienne donc que pourra. Les calques du journal sont envoyés à l'imprimerie. Là- bas, mon imprimeur pris également peur et s'assura bien que nous assumons seul les conséquences qui en découleront au cas ou.

Et le canard tomba.Et la disgrâce aussi. En effet, sitôt le journal apparu, M. Diallo n'eut plus accès à son bureau qui fut immédiatement mis sous scellé. Tout juste a-t-il eu le temps de ramasser quelques effets personnels et de libérer les lieux. La machine était désormais en marche. Ni les tentatives de son épouse auprès de certains cercles du chef de l'Etat ni celle d'autres personnage ne purent l'arrêter. Et c'est ainsi que son Excellence l'ambassadeur Ismaël Diallo tomba en disgrâce et commença pour lui une longue traversée du désert.



La traversée du désert.

Elle débuta de juin 2006 à mai 2007. Pendant donc une année, M. Diallo était sous une sorte de résidence surveillée chez lui à la zone du bois tournant ses pouces puis qu'ayant démissionné de son poste aux Nations Unies, il était sans emploi. Inutile en outre de vous dire que les effets collatéraux ne tardèrent guère. En effet Ismaël tombé en disgrâce, il va s'en dire que son épouse Naye ne sera plus dans les faveurs de la première dame et elle ne pourra plus compter sur cette dernière dans ses affaires. C'est la descente aux enfers du couple Diallo. Madame Diallo avocate de formation, lasse de vivre dans un tel climat préféra rejoindre sa patrie d'origine, les Etats Unis. Quant à M. Diallo, la chance va le sourire de nouveau. En effet, en 1997, lors du choix des candidats aux primaires, il fut désigné par le collège électoral avec Hamidou Guélo comme candidats du CDP. Naturellement, ils furent élus, et Ismaël se retrouva à l' Assemblée Nationale comme député du Séno.

Le député Ismaël Diallo va introduire des innovations dans le rôle du député à travers des actions de proximité qui, de nouveau vont avoir l'adhésion des populations. C'était le seul élu qui parcourait les services étatiques question de s'en quérir des conditions de travail des agents. C'est le seul député qui allait à la rencontre des femmes dans les secteurs pour entendre leurs doléances et échanger avec elles. C'est enfin le seul élu qui avait ouvert un « bureau d'information » à Dori qui centralisait les doléances des populations qui lui étaient adressées. C'était beau tout cela. Mais au moment où la beauté prenait toute sa splendeur que de nouveau tout s'écroula. En effet un beau jour, les sahéliens apprennent sur la voix des ondes que « le député Ismaël Diallo démissionnaire a été remplacé par son suppléant... »Décision de l'Assemblée nationale a-t-on expliqué à l'époque. En vérité, le député Ismaël Diallo, pour on ne sait comment était en mission à l'étranger pour le compte des Nations Unies. Avait-il eu l'autorisation de l'Assemblée Nationale? Cela quadrait-il avec son statut de député? On ne le sait. Toujours est-il que cela lui coûta de nouveau son poste. Que faire. Contraint et forcé, - il faut vivre- M. Diallo va rejoindre ses Nations Unies. De nos jours, l'intéressé, à ce qu'on dit jouirait d'une retraite dorée dans sa résidence de la zone du bois. Certainement qu'il suit avec intérêt cette « affaire Salif Diallo » en se souvenant qu'il y a 13 ans, il avait dit haut et fort ce qui coûte à Salif aujourd'hui la quinine à savoir la patrimonialisation de l'Etat, les clans profiteurs qui gravitent autour du chef de l'Etat, la nécessité d'une refonte de la manière de gouverner. Pour l'avoir dit, il a été chassé comme un malpropre des cercles du pouvoir. Mais 13 ans après, l'histoire lui donne raison devant les mêmes hommes toujours en vie et aux mêmes postes. Justement, le titre de l'interview était: L'ambassadeur Ismaël Diallo: DEVANT LES HOMMES ET DES DEVANT L'HISTOIRE. Et devant les hommes et devant l'histoire, la vérité triomphera. Tôt ou tard.

Prométhée































































28/07/2009
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